La coopération est un principe d’action qui regroupe différents acteurs autour d’objectifs communs. Elle s’accompagne souvent de démarches de mutualisation, consistant à partager avec différentes parties prenantes, des ressources, services ou compétences afin d'optimiser leur utilisation et de bénéficier collectivement de leurs avantages.
La multiplication des interlocuteurs dans ce type de démarche peut susciter des craintes et évoquer une perte de contrôle aux organisations. Cependant, les acteurs de l’Économie Sociale et Solidaire (ESS) qui se distinguent des entreprises du lucratif par leurs activités fondées sur la recherche d’utilité sociale ainsi que par leurs modes de gouvernance souvent démocratiques et participatifs, possèdent déjà, grâce à ces fonctionnements, certaines prédispositions à se tourner vers la coopération et la mutualisation.
Afin d’accroître leur impact et pérenniser leur capacité à accomplir leur mission sociale, la collaboration ou le regroupement avec d'autres acteurs s'avèrent souvent être de véritables leviers d’autonomie et d’actions pour les établissements de l’ESS.
Parmi les différents types de mutualisation, nous pouvons retrouver la mise en commun des ressources financières, matérielles, ainsi que des compétences et des expertises. C’est le cas lorsque des établissements de l'ESS créent un fonds commun pour financer des projets collectifs, partagent l'utilisation d'infrastructures ou organisent des formations communes pour enrichir leurs pratiques.
La co-construction de projets permet ainsi aux acteurs de développer leurs complémentarités et de répondre de manière plus complète et adaptée aux enjeux locaux. C’est ce que nous allons voir à travers les exemples concrets de quelques-uns de nos adhérents.
"Seul on va plus vite, mais ensemble on va plus loin" témoigne Robin Baladi, Coordinateur de l’association Isère Drôme Destination Juniors (IDDJ), réseau qui regroupe les acteurs du tourisme social entre Alpes et Provence : "Nous remarquons qu’en tissant des liens forts et réguliers avec nos partenaires, nos actions communes ont plus de poids. Elles sont plus justes, plus efficaces et plus pertinentes".
Représentant plus de 60 centres de vacances mais aussi des prestataires d’activité du territoire et des organisateurs de séjours, IDDJ est bien placé pour parler de coopération territoriale puisque c’est dans cette optique que le réseau a été créé afin de :
- promouvoir l’offre éducative du territoire de l’Isère et de la Drôme et ses différents centres de vacances. Soumis notamment aux problématiques d’attractivité des territoires ruraux, les établissements touristiques ont bien compris l’intérêt d’avoir un territoire dynamique et reconnu pour son intérêt pédagogique, ses expériences et son offre d’hébergement diversifiée. Le rayonnement de la région participe ainsi au ruissellement économique et profite à tous,
- représenter et défendre les intérêts des professionnels de la filière et des bénéficiaires auprès des collectivités et services de l'Etat à travers la mission de plaidoyer,
- mutualiser les compétences, les ressources et les idées pour faire profiter les centres de vacances de services communs (veille juridique et règlementaire, développement d’outils pédagogiques, montage de dossiers de financements, accompagnement vers la transition écologique, formations). C’est notamment dans le cadre de cet accompagnement, qu’IDDJ offre l’adhésion au Réseau APOGÉES à tous ses établissements afin qu’ils profitent des solutions de mutualisation d’achats et d’optimisation des fonctions supports que propose le Réseau.
L’utilité de la coopération et de la mutualisation est d’autant plus visible en période de crise ou de difficulté économique, lorsque l’adaptabilité face aux enjeux sociaux et économiques devient cruciale pour assurer la pérennité des structures.
IDDJ l’a bien constaté lors de la crise sanitaire du Covid-19, et le constate encore aujourd’hui. En effet, l’ancrage territorial prend encore plus de sens face à l’urgence environnementale et au contexte inflationniste actuel. Pour préparer l’avenir ensemble et augmenter leur résilience face aux changements et aux évolutions de la société, les centres de vacances s’engagent notamment vers une gestion collective et raisonnée des ressources et renforcent leur consommation locale.
Dans un autre domaine, Julie PAQUELIN, Responsable du développement de l’ARFRIPS, un organisme de formation en travail social, confirme que pour sa structure, la coopération a été la solution pour perdurer aux côtés de pairs importants et reconnus du secteur. "Pour survivre à la baisse des subventions des financeurs et faire face au contexte général du médico-social, l’ARFRIPS a rebondi en intensifiant les projets, les évènements et la communication en partenariat avec d’autres acteurs".
En partageant expériences, bonnes pratiques et savoir-faire, les établissements de l'ESS stimulent aussi leur créativité et conçoivent parfois à plusieurs de nouvelles approches pour relever les défis auxquels ils sont confrontés. C’est le cas de l’ARFRIPS, pour qui la multiplication des synergies et des coopérations favorise l'émergence d'innovations sociales.
Voici quelques exemples de ses projets ayant vu le jour :
- Coopération avec des structures d’autres territoires pour ouvrir des formations en commun et se déployer géographiquement (par exemple avec l’ADAPEI du Cantal).
- Création d’une plateforme pour promouvoir la VAE (Validation des Acquis de l’Expérience) dans le champ du social, du médicosocial et du sanitaire avec la collaboration de 10 acteurs du territoire Auvergne Rhône Alpes (AVAETSS). La particularité de cette plateforme étant que ses acteurs en sont non seulement partenaires mais également concurrents ! C’est le jeu d’une grande habilité et intelligence collective qui permet de changer de paradigme en passant de la compétition à la coopétition.
- Partenariat avec l’université Lyon 2 pour proposer des parcours avec double diplôme : un diplôme professionnel (délivré par l’ARFRIPS) et un diplôme universitaire (licence délivrée par l’Université Lyon 2) permettant aux étudiants éducateurs spécialisés / éducateurs techniques spécialisés d’élargir leurs horizons avec plusieurs spécialités (licence en Sociologie ou en Sciences de l’Education) et à l’ARFRIPS de rendre son offre plus attractive.
- Partenariat et création d’un collectif avec d’autres organismes pairs de la région AuRA pour déployer une formation commune (le CNIA - Certificat National d’Intervention en Autisme). Au lieu de s’affronter pour être les premiers à remplir une session, les acteurs du collectif ont préféré s’unir pour mettre en place une communication plus large et impactante afin de faire connaitre cette formation auprès du plus grand nombre et ainsi déployer des sessions chacun leur tour.
- Partenariat institutionnel avec la Métropole de Lyon qui s’engage à accueillir les étudiants stagiaires de l’ARFRIPS dans ses 300 sites qualifiants. En échange, l’ARFRIPS anime des formations et des groupes de travail d’analyse de la pratique pour les professionnels de la Métropole.
Du côté des établissements médico-sociaux, nombreux sont ceux qui ont également choisi de se regrouper afin de renforcer leurs capacités financières et leur maillage territorial. La mutualisation des ressources, qu'elles soient matérielles ou financières, leur permet de partager certains coûts et investissements, d’optimiser leurs budgets, et d’accéder à des moyens qu'ils n'auraient pas obtenus individuellement. De plus, en collaborant avec d'autres acteurs locaux et en privilégiant la coopération territoriale, ils renforcent la dynamique de leur territoire et favorisent l’ancrage au sein de leur communauté, leur permettant souvent d’être plus efficaces dans leur mission sociale.
C'est également le principe même du fonctionnement du Réseau APOGÉES. C'est en mutualisant vos besoins que nous pouvons obtenir de meilleures conditions tarifaires pour les achats de toutes les structures adhérentes au Réseau.
Du point de vue de Doria Bouvier-Estève, Directrice de l’EHPAD Le Hameau des Ainés situé à Bully dans le Beaujolais (Rhône) "la coopération et les partenariats sont des accélérateurs qui permettent de mettre l’humain au cœur des projets et qui aideront peut-être à repenser le modèle des EHPAD pour s’adapter à l’avenir". D’après elle, "ce travail de collaboration en mode projet anime la nouvelle génération de professionnels et permet de répondre aux envies et besoins des futurs résidents".
Ainsi l’association La Salette-Bully qui porte cette structure est également membre de plusieurs réseaux de coopération pour renforcer son ancrage local et améliorer la qualité de ses services :
- Tout d'abord, elle participe activement au réseau gérontologique de la Turdine Brévenne, regroupant divers établissements de la vallée, tels qu’hôpitaux, résidences séniors, services d'aide à domicile, etc. Cette coopération vise à coordonner les actions en faveur des résidents et à mutualiser les moyens humains et matériels pour un meilleur accompagnement des personnes âgées et de leur entourage. Cette collaboration a un impact significatif sur le parcours des résidents et sur la qualité des prestations des établissements car les échanges se font à tous les niveaux : entre les directions, les médecins, les cadres de santé, les animateurs, les psychologues, etc.
- Ensuite, l’association s’est rapprochée d’une quinzaine de structures associatives du Rhône et de l'Ain. Ce partenariat interdépartemental permet de mutualiser les moyens et les compétences dans la gestion des établissements, d'optimiser le temps et l'échange sur les pratiques professionnelles, tout en permettant des économies d'échelle au bénéfice des personnes accueillies.
- Enfin, l'EHPAD est affilié à la FNAQPA et la FEHAP, des fédérations nationales intervenant auprès des pouvoirs publics pour défendre les intérêts du secteur médico-social associatif. Ces fédérations représentent les établissements au niveau national et jouent un rôle de plaidoyer pour faire remonter les problèmes rencontrés sur le terrain. Elles accompagnent également les établissements sur la veille juridique des textes de loi importants pour le secteur, et apportent expertises et soutien sur différentes thématiques telles que ressources humaines, formations, audits, diagnostics, etc.
En somme, l'EHPAD Le Hameau des Aînés, l’ARFRIPS ou encore les adhérents d’IDDJ, ont su tisser des liens solides avec différents acteurs du territoire en optant pour divers types de coopération et de mutualisation. Ces collaborations leur permettent notamment de garantir une qualité d'accompagnement ou de service, de mutualiser les ressources, d'optimiser les pratiques professionnelles et de se faire entendre auprès des instances politiques.
Ces exemples illustrent comment la mutualisation et la coopération territoriale peuvent être bénéfiques aux établissements de l'ESS. En travaillant ensemble, ils parviennent à renforcer leur capacité à développer des projets innovants et à répondre aux besoins de leur communauté locale. Cette collaboration leur permet également de contribuer activement à la construction d'une économie plus responsable, durable et solidaire et de renforcer ainsi leur impact social et économique.
Ce sujet vous intéresse ? N’hésitez pas à consulter notre article sur les enjeux de la coopération territoriale.
Le site des Achats Responsables Mutualisés est propulsé par le Réseau APOGÉES en réponse aux besoins explicités par les adhérents du Réseau d’avoir un espace de partage entre pairs et des solutions clés en main pour piloter leur politique d’achats durables.
Devenez adhérent du Réseau APOGÉES pour bénéficier de notre force de mutualisation et mieux maîtriser vos fonctions support.
Le Réseau APOGÉES remercie toutes les personnes citées dans cet article pour leurs témoignages :
- M. Robin Baladi, Coordinateur de l’association Isère Drôme Destination Juniors (IDDJ), réseau qui regroupe les acteurs du tourisme social entre Alpes et Provence,
- Mme Julie Paquelin, Responsable du développement et formatrice à l’ARFRIPS, Association d’Auvergne Rhône-Alpes pour la Formation, la Recherche et l’Innovation en Pratique Sociale,
- Mme Doria Bouvier-Estève, Directrice de l’EHPAD Le Hameau des Aînés et de l’Accueil de Jour Les Tournesols à Bully dans le Rhône,
Ainsi que ses collaborateurs pour l’écriture, le recueil des interviews et leurs expertises :
- Laurence Laplace, Chargée d’accompagnement et des territoires du Réseau APOGÉES,
- Anne Ruat-Tchekemian, Adjointe de coordination Sud-Est du Réseau APOGÉES,
- Zoé Branche, Chargée de marketing du Réseau APOGÉES.
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